Chronique sur Le Cirque au Cinéma tenue par Micky Biblot
Si une enseigne a servi d’écrin à des films britanniques des années soixante, c’est bien le Billy Smart’s Circus, mettant à disposition du septième art, personnel, animaux et logistique d’un établissement parmi les plus célèbres du Royaume Uni.
Circus of Horror 
Circus of horrors - Billy Smart’s Circus

Circus of horrors

En 1960, le réalisateur Sydney Hayers se fond à la structure du Billy Smart’s Circus pour en tirer des scènes d’actions, faisant croire que l’histoire se passe en France au début, puis dans un long séjour à Berlin, et pour un épilogue dans le cadre d’un gala de charité effectivement tourné à Londres. Dans Circus of Horror  (Le cirque de l’horreur) les véhicules sont recouverts du nom de son propriétaire, Bernarhd Schüler (Anton Driffing), un acteur qui fut très sollicité pour les rôles de nazis, mais cette fois jouant le rôle de l’ex-docteur Rosita, qui a trouvé dans le cirque un moyen de se faire oublier.

Dix ans avant, le docteur avait adopté une enfant de la balle, Nicole, après avoir gommé des cicatrices sur son visage. Mais celle-ci ne mesure pas la cruauté de celui qu’elle appelle son oncle depuis longtemps. En effet, dans le passé, le toubib n’avait pas porté assistance au père de la jeune fille et, après une nuit de beuverie célébrant un contrat entre les deux hommes, il avait laissé son associé (Donald Pleasance) se faire terrasser par l’ours Bosco, dans une scène survenue au petit cirque Vanet en remise près de Bordeaux. Le chirurgien ayant les mains libres, il hérite du cirque mais il continuera à exercer son talent sur des modèles plus âgés qu’il tient aux ordres dans sa prison dorée, offrant un show dans un chapiteau gigantesque animé par l’acrobate aérienne Elisa Caro, la voltigeuse équestre Magda Von Beck, et la dompteuse de fauves Melina Troy. Toutes trois sont tombées sous le scalpel et le charme de leur bienfaiteur, se disputant l’affiche au titre de la nouvelle star, pour au bout du compte, disparaître des feux de la rampe de façon subite. Le docteur est aidé dans sa quête esthétique par deux complices (interprétés par Jane Hilton et Kenneth Griffits) qui vont, au fil de temps, désavouer la folie de leur mentor. Autre élément, le rôle de Nicole Vanet à l’âge adulte est repris par la comédienne française Yvonne Monlaur, tandis que son soupirant Monsieur Desmond, (Conrad Philips) est un agent du Scotland Yard chargé d’enquêter sur le Jinx circus (Le cirque de la poisse) du docteur Schüler.

Le recensement animalier s’établit ainsi : Quatre chimpanzés sur un trampoline, une liberté de huit frisons hollandais empanachées et six fauves à crinière dans la cage centrale. Egalement, six éléphants d’Asie défileront pendant la parade, suivis de quatre dromadaires blancs, trois zèbres qui traversent – Zebra crossing signifiant passage clouté en Anglais – et une paire de lamas ferment la marche du défilé, sans oublier la douzaine d’ours blanc vu dans le zoo. Le genre humain n’est pas en reste et propose corde lisse, échelle suspendue, trapèze volant mais aussi cracheur de feu, lanceur de couteaux ainsi qu’une cohorte de clowns prête à intervenir entre les numéros. Malgré l’appellation Schüler, l’on aperçoit sur les convois, le tunnel des fauves ou le pull-over des hommes de piste, la couleur vert pomme, chère à la famille Smart. Pour les plus fondus, la caravane directoriale est filmée dehors comme dedans, un autre plan offre un véhicule très british contenant la centrale électrique, encore un camion GMC de la seconde guerre apparaît, repeint à moitié en blanc et l’autre moitié d’un vert différent de la teinte kaki.

Retour au drame : Une nuit, le gorille coince Schüler contre les barreaux de sa cage et l’amoche salement, mais la chute sera encore plus rude pour le docteur, finissant devant son temple de la beauté sous les roues de la Bentley d’une patiente qu’il avait bâclée dans le passé.

Circus of Fear 
Circus of fear - Billy Smart's Circus

Circus of fear

En 1966, un autre réalisateur Anglais, John Moxey, sollicite le Billy Smart’s Circus pour un long métrage qui se passe au quartier d’hiver du cirque à Windsor.

Nous aurons tout de même droit à une séquence sous chapiteau à la 20ème minute de Circus of Fear (Le cirque de la peur) et observation troublante, les extraits de spectacle proviennent entièrement du film de Sydney Hayers six ans plutôt, à savoir, des trapézistes évoluant avec un partenaire en costume de ville avec un public à l’identique riant de ses maladresses, tandis que des plus jeunes le croit réellement novice. Après les volants, Moxey nous refait le coup avec les lions à la sortie du tunnel et dans les déplacements dans la cage, récidivant enfin avec la femme crachant le feu n’ayant pas pris une ride. En fait, une occasion pour le réalisateur de présenter ses propres comédiens côté coulisse.

Auparavant, un gang a braqué un fourgon sur Tower bridge et le fric a été évacué par bateau sur la Tamise. Un truand remettra alors le butin à l’organisateur du casse dans ce qui semble être un local à accessoires, mais il le paye cash à la livraison, et le chef le supprime.

La question est : Le metteur en scène a-t-il montré le cerveau dans les coulisses du show ? Probablement oui, si l’on se réfère au titre du film.Deuxième question : Quels sont les suspects du détective Elliot, (Léo Gen) ? Le ringmaster sympa Karl, (Heinz Drache) qui cache pourtant quelque chose, le Lion Teamer Grégor, (Christopher Lee) cagoulé car il a eu le visage défiguré par un fauve, le Knife-thrower Mario (Maurice Kaufman) un coupable trop évident en lanceur de couteaux ; son assistante, la blonde Gina, (Margaret Lee) a un amant secret, tandis que Natacha (Suzy Kendall) suit les traces de son oncle Gregor, le dompteur masqué. Enfin ce n’est pas, tout de même, pas l’excentrique monsieur Big (Skip Martin). Toujours est-il que le pognon est planqué sous la remorque des lions, alors que l’inspecteur va chercher le meurtrier et l’argent AU Billy Smart’s Circus renommé pour l’occasion en Barberini’s Circus. La caméra montre alors le retour des véhicules à la remise. Dommage que le réalisateur n’est pas insisté sur le convoi routier car cela commençait fort avec un mini camion tirant à lui seul trois roulottes. De leur côté, éléphants et dromadaires retrouvent leur quartier d’hiver tandis que les artistes vont vivre dans des caravanes au repos, autour d’un hangar abritant un manège à deux pistes. Le sol en est recouvert de sciure et les murs peints en blanc en alternance avec du vert pistache, notant la présence sous la structure du véhicule Booking Office portant le numéro 1 de l’établissement.

À défaut de shows, de nombreuses répétitions d’animaux s’enchaînent dans le Winter Quarter sur fond des visites du Coroner Elliot. Nous vivrons également, l’embauche dans les locaux de Manfred (Klaus Kinski), un gangster voulant récupérer le magot et venger son camarade assassiné. Un bon film en sorte, car tout porte à croire que le comédien Christopher Lee en est la tête pensante jusqu’à la fin. Mais à noter une faiblesse : son masque, dans un bout de tissus cousu à la va-vite et grossièrement découpée de trois orifices.

Circus of Blood 
Cercle de Sang - Billy Smart’s Circus

Le Cercle de Sang au Billy Smart’s Circus

En 1967, après celui de l’horreur et de la peur, Le cercle du sang (Bersek), c’est à dire Circus of Blood  de Jeff O’ Conolly explore les installations du Billy Smart’s Circus sous l’appellation « Great Rivers Circus ».

Un thriller classique où a lieu une série de sabotages, avec dans le rôle phare, Joan Crawford, au poste inhabituel de patronne de cirque. Une intrigue permettant tout de même de revoir des artistes du Billy Smart’s Circus qui ont marqué leur époque et, de fait, en citer certains.

Bersek au Billy Smart’s Circus

Bersek

Ainsi défile dans la piste Stanley Smart (Billy Smart junior) qui dirige un troupeau de dix éléphants d’Asie dans une présentation que l’on sent réglée au millimètre, sa sœur Yasmine Smart s’occupe avec talent comme elle le fait encore de nos jours de toute la partie équestre.

Mais cela ne constitue pas la seule force animalière, puisque nous retrouvons un dresseur qui a évolué plusieurs saisons chez Smart, Charles Illeneb dans une entrée en cage en férocité comportant des fauves à crinières ; auparavant il avait aussi présenté des tigres et des ours blancs du géant anglais. Autre habituée de la structure, Phyllis Allan propose un numéro rythmé avec une douzaine de caniches enjoués dont un est fil-de-fériste. Ce mélodrame contient aussi une séquence d’aériens, avec les De Riaz, deux hommes et une femme évoluent sur une fusée équipée d’un trapèze. Pour conclure, le coupable ne sera pas celui que l’on croit.

Micky Biblot

Adaptation de l’article Billy Smart’s Circus au cinéma par Micky Biblot paru dans Bretagne Circus – mai 2015.

À lire à propos de Billy Smart’s Circus
  • Cirque au Cinéma – Cinéma au Cirque – Adrian – 1984.
  • Billy Smart’s Circus – Davis Jamieson – Aardwark Publishing – Buntingford – 2004.
  • Panorama des Cirques Européens – Christian Leyder – Arts des 2 Mondes – Paris – 2016.