Little Walter Junior dans ses fantaisies musicales : une attraction internationale surprenante et originale.
Little Walter Junior, le fou musicien
Le numéro d’excentricités musicales de Little Walter Family, véritable feu d’artifice de musique avec une bonne vingtaine d’instruments différents, entrecoupé de gags drôles et surprenants, était d’une classe exceptionnelle. Le succès de cette attraction était fracassant.
Cette attraction avait été créée par Eugène Alexandre (né à Tours le 1er août 1904), dit Joe Walter, ou encore Little Walter Junior, le fils du célèbre clown international Walthère Ulric Alexandre dit, Walter. Dès l’âge de quatre ans, il débuta avec son père, à Copenhague. Après des études musicales au Conservatoire de Musique, où il étudia l’harmonie, le violoncelle et le basson, il fit à nouveau équipe avec son père, dans un numéro de clowns musicaux, les Walter Bros.
En costume Prince de Galles
Après le décès de son père en 1937, il se lança dans les excentricités musicales en compagnie de son beau-frère Roberto Germain, puis avec d’autres partenaires occasionnels. Little Walter Junior s’était composé un personnage original, de rapin distingué, vêtu d’un ample pardessus trapézoïdal, aux épaules démesurément élargies, d’un costume Prince de Galles serré aux chevilles et coiffé d’un Stetson en accent circonflexe. Il se présentait sans maquillage, les cheveux longs recouvrant ses oreilles. Incontestablement, sa silhouette était originale.
Après la guerre, il monta avec ses trois filles Emilie dite Miquette ou Emy, Liliane et Valérie dite Valia, un numéro d’excentricités musicales intitulé The Little Walter family, ou encore le fou musicien, qu’il promena dans le monde entier.
Little Walter Junior dans Tiger Rag
Pour commencer, Miquette, Liliane et Valia, en robe soirée, entamaient au saxo, une entrée brillante de Cole Porter.
Joe Walter, vêtu de son large manteau, faisait alors son entrée. Il jouait un morceau du Pays du Sourire au basson, suivi de Diana à la clarinette, puis, debout sur une chaise, Tristesse de Chopin au violoncelle. Ses filles attaquaient un morceau de concertina, puis à quatre, enchaînaient Parlez-moi d’amour, (hautbois, flûte, cor anglais et clarinette). Venait ensuite le quatuor de double saxos. Les demoiselles jouaient Les cloches de Corneville sur des clochettes à battants. En solo, Joe interprétait une petite valse à la trompette de cavalerie. Les trois filles revenaient en costume militaire pour le final aux trompettes, tandis que Joe paradait, affublé d’une grosse caisse et de cymbales. En rappel, ils terminaient avec un Tiger Rag endiablé.
Musique…
En une vingtaine de minutes, le public assistait alors à un véritable feu d’artifices de musique avec une bonne vingtaine d’instruments différents, entrecoupé de gags drôles et surprenants. La musique était variée allant du classique au jazz en passant par la variété. Lorsque tous les quatre jouaient simultanément de deux saxos à la fois, le temps semblait s’arrêter. Ces fantaisies musicales étaient ponctuées de réflexions humoristiques, cocasses ou inattendues.
Dans les Nouvelles Littéraires, Tristan Rémy écrivait :
« …Walter est un numéro qui dure, au cirque Pinder, près d’un quart d’heure. Dès son arrivée, il tient suspendus à ses facéties quelque cinq à six mille spectateurs passionnés et trépidants, sous le charme de la surprise et l’emprise de son originalité… »
Little Walter Junior et sa famille musicale
Pendant une vingtaine d’années, The Little Walter Family se produisit dans toute l’Europe et l’Amérique. En plus de son numéro, il monta également avec ses filles et un partenaire, une entrée de clowns traditionnelle avec un final sur échasses. En avril 1963, le merveilleux Serge écrivit dans un de ses articles :
« …Il y a le retour de Little Walter, un énergumène comique de bon aloi, ne se contentant pas seulement des facilités du rire, mais innovant, avec ses trois filles, un petit chef-d’œuvre, dans le style des entrées à l’anglaise, qui marquera par son style toute l’épopée de la joie. […] Depuis longtemps, depuis Grock, on n’avait assisté, sur piste, à pareil déferlement du comique. Little Walter, héritier d’un grand nom des pistes, vient de réaliser l’un des meilleurs exploits de sa carrière, qui est déjà longue, et de se placer ainsi au tout premier rang des comiques mondiaux. Je suis pourtant avare de louanges, mais il faut avouer que tout ce nouveau programme est parfait… »
Les grandes maisons
On peut citer parmi les principaux cirques où ils se sont produits : Pinder en 1951, Medrano en 1952, Hippodrome de Great Yarmouth en 1955, le Cirque d’Hiver et Napoléon Rancy en 1958… Amar en Afrique du Nord en 1959, Benneweis au Danemark en 1960, Amar en Autriche en 1961… le Grand Cirque de France en 1961, Medrano et Napoléon Rancy en 1962… le Cirque d’Hiver et le City Circus en 1963.
Un brillant hommage
Little Walter Junior fit ses adieux au public en 1965 et se retira à Chennevières-sur-Marne, Ses filles abandonnèrent le métier en même temps que lui. Il décéda le 20 mars 1986. à Créteil dans sa quatre-vingtième année. Dans la revue Le Cirque dans l’Univers, le rédacteur en chef Lucien René Dauven, dans un article parfaitement documenté, lui rendit un brillant hommage.
Dominique Denis
Extrait et Adaptation de : Les Excentriques musicaux au Cirque – Dominique Denis – Arts des 2 Mondes. (en cours de réédition)
Sources
- Le fou musicien
- Les Clowns – Tristan Rémy.
- The Hippodrome Great Yarmouth – Donald Stacey.
- Les Cirques frères Amar – Dominique Denis.
- L’habit ne fait pas l’excentrique – Tristan Rémy – Scènes et Pistes – 1958.
- Little Walter, le fou musicien – L. Ganz et J. P. Vivier – La Voix du Cirque n° 7.
- Tiger Rag
- Album Maïss – Dominique Denis.
- Un excellent bouffon français, Little Walter – Tristan Rémy – Les Nouvelles Littéraires – 26/4/1951.
- Famille musicale
- Little Walter, roi du burlesque au Cirque d’Hiver – Serge – avril 1953.
- Little Walter – L. R. Dauven – Le Cirque dans l’Univers – n° 141.
A lire :
Les Excentriques musicaux au Cirque – Dominique Denis – Arts des 2 Mondes – 2006 (en cours de réédition)