Le Maître des maÎtres François Baucher révolutionna l’art équestre au Cirque des Champs-Elysées.

Le travail exceptionnel du maître

François Baucher  - le piaffer sur Capitaine
François Baucher sur Capitaine – le piaffer

Ce fut un véritable coup de tonnerre aux Champs-Elysées lorsque François Baucher apparut sur la piste du Cirque National au printemps 1839. Le public composé en grande partie d’amateurs d’art hippique fut littéralement subjugué par le travail exceptionnel du maître. 

Créateur d’une nouvelle école, il réussit l’exploit de donner une légèreté à ses chevaux.

Il fut admiré, et même jalousé par certains, le comte d’Aure en tête, qui lui reprochaient de se produire en public. A ses détracteurs il leur répondait par cette phrase qui fut transcrit par plusieurs auteurs :

“… À ceux, donc, qui prétendent que je ravale mon titre d’écuyer en me mettant en scène, je réponds que Molière et Shakespeare avaient, aussi, la bassesse de jouer leurs pièces en public…” 

Sous le signe du cheval 

François Baucher - dessin
François Baucher – portrait

Avec ses chevaux d’école comme Partisan, Capitaine, Neptune, Buridan, il triompha devant le tout-Paris. 

Selon selon son acte de naissance, François Baucher était né, à Versailles, le 18 juin 1796 (acte de naissance n° 726). Son père Pierre Baucher était postillon de chaise de poste. Quand il se maria avec Marie Thérèse Serouge (qui fut ortographié, plus tard, Lerouge), il devint marchand de vin. 

À l’âge de quatorze ans, le jeune François partit à Milan rejoindre son oncle qui travaillait aux écuries de Camille Borghèse. Quatre ans plus tard, il retourna dans sa ville natale, et étudia avec soin le travail de l’écuyer d’Abzac, ex-écuyer du roi Louis XV

Enfin, en 1816, Baucher réussit à se faire embaucher comme piqueur aux écuries du duc de Berry. Deux ans plus tard, il se mariait avec Antoinette Harct, et eut un fils Henri.

Fêtes équestres

Après l’assassinat du duc de Berry, en 1820, il fut engagé, au Havre, comme écuyer au manège de Chatillon. Il s’établit à Rouen pour donner des cours au manège de la rue Dugay-Trouin, en octobre 1831. Il publia, deux ans plus tard, son premier ouvrage le Dictionnaire raisonné d’équitation. Dans les milieux équestres et mondains, sa notoriété ne cessait de grandir.

Jules-Charles Pellier, écuyer de tradition renommé, s’associa en juin 1834 avec lui pour créer une école à Paris, 11 rue du faubourg Saint-Martin. Leur clientèle était composé en grande partie d’aristocrates et d’officiers de cavalerie. 

Chaque année, ils organisaient une fête équestre qui était très courrue. Ils organisérent également quelques spectacles dans les jardins de Tivoli durant l’été 1837. 

Le cirque du Pecq

Le capitaine de spahis Alloard de Saint Hillaire, par l’intermédaire d’Ernest Leroy vendit à François Baucher, le 10 août 1837, un cheval fougueux réputé indomptable du nom de Partisan.Avec patience, il réussit à métamorphoser l’animal rebelle en un cheval d’une docilité exemplaire. La nouvelle se répandit immédiatement parmi les amateurs d’art équestre.

Laurent et Henri Franconi, l’année suivante, apportèrent leur parrainage à Jules-Charles Pellier et François Baucher pour crééer une nouvelle entreprise. Il s’agissait de fonder un cirque au Pecq, situé non loin de l’arrivée du premier chemin de fer français qui avait ouvert sa ligne l’année précédante. Faute d’un nombre de spectateurs suffisant, cette aventure ne dura que cinquante jours, du 13 mai au 8 juillet 1838.

Au Champs-Elysées

François Baucher - Partisan - piaffer
François Baucher sur Partisan – piaffer

Louis Dejean engagea François Baucher pour son cirque des Champs-Elysées, en toile et en planches, lors de sa saison d’été 1839. Avec Partisan, il excella dans les airs d’école comme le piaffer et le galop arrière, les changements de pied au temps, les pirouettes au galop sur trois jambes, ou les pirouettes au piaffer. À partir de septembre 1839, il monta sa monture Capitaine qui émerveilla le tout-Paris.

À l’ouverture de la saison en juin 1841, dans cet établissement nouvellement construit en pierre, le public parisien, le Jockey Club en tête, ovationna le maître écuyers entouré d’une pléiade de ballerines à cheval et d’écuyers exceptionnels sous l’autorité du maître de manège Adolphe Franconi.

Il réussit à dresser Guericault, un pur-sang rétif, appartenant à Lord Seymour, qui désarçonnait tous ses cavaliers. Il présenta ensuite ce cheval au Cirque des Champs-Elysées dans une reprise classique.

Etoiles de la Piste

François Baucher - Savoir
François Baucher sur Savoir

Considéré comme un maître, François Baucher enseigna également l’art de la Haute Ecole à des artistes renommées comme Pauline Cuzent ou Caroline Loyo. La première qui montait Buridan avec finesse et élégance, était considérée comme l’amazone idéale. La seconde, surnommée la diva de la cravache triompha avec plusieurs montures comme Rutler, Russe, Jupiter ou Junon.

De nombreux écuyers, qui devinrent par la suite des directeurs prestigieux, tels Gaetano Ciniselli, Magnus Hinné, Théodore Rancy ou Fernando, profitèrent également de son précieux enseignement.

Outre ses nombreuses activités, il écrivit d’autres ouvrages dont, en 1842, La méthode d’équitation basée sur de nouveaux principes, qui fut un succès réédité plusieurs fois. 

François Baucher continua de se produire au Cirque National des Champs-Elysées, en 1844 avec Capitaine, et l’année suivante au Cirque Olympique, ces deux établissements étant passés sous la direction de Jules Gallois.

Au Cirque Soullier

François Baucher au Roten Hause 1847
Affiche Roten Hause 1847

Le directeur Louis Soullier, qui avait épousé Laura, la veuve de Cristoph de Bach, l’appela pour donner des représentations à Vienne, Feuerwerkplatz, en 1846. Les représentations continuèrent l’année d’après, toujours dans la capitale impériale, au Roten Haus (décembre 1847 – janvier 1848). Le Cirque Soullier partit ensuite dans les Etats italiens, puis en Suisse. 

On retrouve Baucher à Lyon, au Colisée en octobre 1848, avec Partisan. Un mois plus tard, retour à Genève… à nouveau dans la capitale des Gaules, au Jardin d’Hiver, en décembre, où il monta son cheval Kléber

Toujours avec Louis Soullier, il se produisit au Polygone de Toulouse en mai 1849, avec Bloc un cheval de labour, et avec Partisan, Kléber et Sandor, puis une fois encore à Lyon, au Colisée, en septembre.

L’accident 

Le lustre du Cirque Napoléon - François Baucher
Le lustre du Cirque Napoléon

Après un séjour à Rouen, François Baucher participa à la tournée du Cirque National de Paris de Louis Dejean à Berlin qui débuta en novembre 1850 et se prolongea à Leipzig durent l’été 1851, pour retourner ensuite dans la capitale prussienne. La troupe de Dejean se produisit à Bruxelles à partir de mars 1852. Baucher monta alors Chandor, son dernier cheval d’école.

Retour à Paris de Baucher et Dejean (ce dernier avait repris en 1847 la direction effective du Cirque des Champs-Elysées). Lors de la première du Cirque Napoléon, le 11 décembre 1852, François Baucher monta Zamba.

Lors de la répétition au Cirque Napoléon, le 8  mars 1855, juste au moment où Baucher répétait, le câble de fer qui suspendait le lustre central se rompît. Il tomba sur la piste avec fracas et renversa François Baucher qui eut la jambe écrasé.

François Baucher

François Baucher - cirque
François Baucher au Cirque

Suite à une longue convalescence, François Baucher se consacra entièrement à son enseignement.

Napoléon III lui accorda une confortable pension. Après le décès de son épouse, il s’installa rue Amelot, tout près du Cirque Napoléon. Son ami le général Lhotte lui rendait fréquémment visite. François Baucher décéda à son domicile parisien dans la nuit du 13 au 14 mars 1873. Ses funérailles eurent lieu au cimetière du Père Lachaise. 

Le Cirque, spectacle équestre par essence, reste profondémment reconnaissant à François Baucher pour son oeuvre. Toute sa vie, il s’attacha à ses principes : « … Donner une même légèreté à tous les chevaux est le but que doit atteindre l’écuyer et la raison, qui fait la raison qui fait une science exacte de l’art d’équitation… » 

Dominique Denis

Sources 

  • Acte de naissance – n° 726 – recherches Paul Salasca.
  • Artiste Lexicon – Signor Saltarino.
  • Ecuyers et Ecuyères – Baron de Vaux.
  • La Merveilleuse Histoire du Cirque – Henry Thétard.
  • Histoire des Chevaux célèbres – P. J. B .N.
  • Le Cirque et ses Etoiles – Tristan Rémy.
  • Histoire Illustrée des Cirques Parisiens – Adrian.
  • Dictionnaire du Cirque – Dominique Denis.
  • Cirques en bois, cirques en pierre de France – Charles Degeldère et Dominique Denis.
  • Louis Dejean – Tristan Rémy – Le Cirque dans l’Univers – n° 66.
  • François Baucher – H. Cazier-Charpentier – Le Cirque dans l’Univers – n° 42.
  • Vie de Baucher – Alain Fabre.
  • Baucher, sa première manière – Michel Henriquet – Plaisirs Equestres – décembre 1977.
  • Le cirque du Pecq – Tristan Rémy – Le Cirque dans l’Univers – n° 66.
  • Premiers cirques parisiens – Dominique Denis – circus-parade.com
  • Partisan et Baucher – Tristan Rémy – Cirque n° 1.
  • Cirque des Champs-Elysées – Dominique Denis – circus-parade.com
  • Louis Dejean et le Cirque Olympique en Angleterre – Tristan Rémy – Le Cirque dans l’Univers – n° 70.
  • Circus-Archäologie – Hermann Saguemüller.

Sources – suite

  • Louis Dejean à Berlin – Tristan Rémy – Le Cirque dans l’Univers – n° 72.
  • Louis Dejean monarque du cirque français – Dominique Denis – circus-parade.com
  • Cirque Olympique  J. J. – Le Journal des Débats – 9/8/1835.
  • Gazette des Tribunaux – 13/05/1841 – 11/3/1855.
  • Ferdinand Laloue – Tristan Rémy – Le Cirque dans l’Univers – n° 61.
  • Le Magasin Pittoresque – juin 1844.
  • Affiche Cirque National – 21/9/1844.
  • Le Charivari – 1845.
  • Circusarchiv.com
  • La première du Cirque Napoléon – M. J. Vesque – Le Cirque dans l’Univers – n° 11.
  • Les artistes du Cirque Napoléon – Jean Delannoy –  Le Cirque dans l’Univers – n° 11.
  • Cirque Napoléon – Dominique Denis – circus-parade.com
  • Un glorieux centenaire – Henri Thétard – Le Cirque dans l’Univers – n° 11. 
  • Le Peuple Souverain – 4/10/1848.
  • Le Salut Public – 10/10/1948 – 18/10/1848 – 27/9/1849.
  • Le Journal de Genève – 20/11/1848.
  • Le Censeur – 15/12/1848.
  • Le Journal de Toulouse – 5/5/1849.

Livres de François Baucher

  • Dictionnaire raisonné d’équitation (1833)
  • Le résumé complet des principes de la nouvelle méthode (1837)
  • Les passe-temps équestres (1840)
  • Dialogue sur l’équitation (1841)
  • Méthode d’équitation basée sur de nouveaux principes (1842)

A lire

  • Méthode d’équitation basée sur de nouveaux principes – François Baucher – Mazeto Square – Paris – 2016.
  • Oeuvres complètes – François Baucher – Belin – 2018.