Krone – direction Carl Krone

De 1914 à 1943, Carl Krone dirigea, de main de maître, un des plus beaux et importants cirque européens… un modèle du genre.

par Belmonte Bates

De Charles à Krone

Carl Krone, en 1914, à la tête de son Circus Charles, s’était déjà produit en France et en Autriche-Hongrie. Une fois son chapiteau planté à Vienne, il se rendit vite compte que le public n’était pas au rendez-vous. Il faut dire, qu’entre-temps, l’Empire Austro-hongrois avait déclaré la guerre à la Serbie, suite à l’assassinat, à Sarajevo, le 28 juin, de l’archiduc François-Ferdinand par un terroriste… On connaît la suite…

En conséquence, l’intitulé Circus Charles, de connotation française, n’incita pas les Viennois à se rendre en masse à un spectacle proposé par un établissement étranger devenu de facto ennemi. Le problème fut vite résolu… Le 26 septembre 1914, l’enseigne devenait Krone… Et les spectateurs vinrent en masse.

Deux mois plus tard, le temps se rafraichissant, Krone s’installa dans le bâtiment de Busch.

Première guerre mondiale

Toujours dans la capitale autrichienne Frieda, la fille de Carl et Ida, vint au monde le 15 avril 1915.

Malgré la guerre, qui au départ devait être courte, Krone continua ses représentations. Certes, les conditions devenaient plus difficiles. Mais Carl et Ida Krone réussirent à augmenter leur ménagerie avec l’acquisition d’une girafe, d’un hippopotame et d’un rhinocéros. En piste, on pouvait applaudir un kangourou boxeur, cinq ours polaires, sept éléphants et quinze tigres.

Cette première guerre mondiale, enfin terminée, se résulta par le démembrement de l’empire Austro-Hongrois, Ottoman, et l’affaiblissement de l’Allemagne. Dès lors, Carl Krone se replia à Munich.

Kronebau

Dans la capitale bavaroise, début 1919, Carl Krone acheta un terrain pour y établir ses quartiers d’hiver. L’architecte Josef A. Ruprecht lui construisit un cirque en bois, avec des annexes, d’une contenance de 4 000 spectateurs.

L’inauguration du Kronebau de Munich eut lieu le 10 mai 1919.

Après le traité de Versailles qui ruina l’Allemagne, les cirques allemands, pour survivre, durent s’expatrier. Par chance, Carl Krone, après un passage en Suisse, réussit à organiser plusieurs tournées en Italie de 1921 à 1924. Ce périple terminé, Carl Krone retourna en Allemagne, après un passage en Suisse. À la manière des géants américains, il acquit un chapiteau à six mâts d’une contenance de 10 000 spectateurs. La façade monumentale mesurait 120 mètres. Quelques années plus tard, Carl Krone se fit construire des voitures sur mesure pour transporter le matériel. Le Cirque Krone voyageait par le rail.

Tournées européennes

Sur trois pistes, le spectacle comprenait des tableaux d’ensemble, une course de chars, un ballet, une horde de vingt éléphants et une cavalerie d’une soixantaine de chevaux. Les spectacles étaient sensationnels avec des attractions de premier ordre. Krone servit de modèle à de grandes entreprises comme Strassburger, Blumenfeld, Kludsky et Gleich tandis que Sarrasani restait son concurrent le plus important.

Entre 1924 et 1927, Krone retourna en Suisse, Italie et Autriche. La saison 1927/28 se passa en Espagne.

La crise économique américaine de 1929 eut également de répercussions en Allemagne. Habilement, Carl Krone allégea son matériel et parcourut ensuite les Pays-Bas, l’Autriche, la Hongrie, l’Italie, et la  France.

Quelle ménagerie !

En pleine gloire, la ménagerie Krone comprenait un nombre impréssionnant de pensionnaires. Parmi ceux-ci on pouvait voir deux hippopotames, deux girafes, deux éléphants de mer et douze  otaries…  Pour les exotiques : des buffles, bisons et zébus, lamas, antilopes, zèbres, chameaux et dromadaires… des loups, chacals, 36 tigres, 40 lions et 54 ours… plus 27 éléphants… 250 chevaux et poneys… sans compter des dogues, ânes, chèvres, une centaine de singes, de serpents et d’oiseaux.

Autre point fort de Krone : une importante troupe d’authentiques Peaux-rouges et de cow-boys, ainsi que des sauteurs arabes et des acrobates chinois et japonais.

Quatre mâts au carré

De retour en Allemagne, Carl Krone opta pour un chapiteau rond, à quatre mâts au carré, ce qui a permettait de se produire dans des villes de taille moyennes, et d’augmenter ainsi ses nombres de représentations.

Ida et Carl Krone devinrent grand-parent avec la naissance de leur petite-fille Cristel le 27 novembre 1936, à Munich. L’année suivante, la famille Krone acheta un ferme à Wessling,à  côté de Munich, pour abriter leurs nombreux animaux.

Frieda s’était marié avec Carl Sembach (né le 8 décembre 1908 à Francfort-sur-le-Main). Bien que non originaire du Cirque, il s’était spécialisé dans le dressage de chats sauvages, puis présenta des fauves au Cirkus Konrado et au Traumland de Berlin. Ensuite, Carl Krone lui confia un groupe de lions pour un contrat en Russie. Une fois marié avec Frieda Krone, Carl Sembach se consacra aux chevaux.

Le directeur Karl Krone

Début septembre 1939, la France et le Royaume-Uni déclaraient la guerre à l’Allemagne, et la période d’austérité reprit. Le chapiteau Krone voyagea, en 1940, en Autriche et en Tchécoslovaquie… et l’année suivante en Pologne.

En plein conflit, Carl Krone, âgé de  soixante-treize ans, mourut le 4 juin 1943.

Sa veuve, Ida Krone, et Frieda et Carl Sembach reprirent la direction du cirque. À la fin de l’année suivante, le 12 décembre, le Kronebau de Munich était détruit par les bombardements de l’aviation alliée.

Malgré deux grandes guerres mondiales, plus une situation catastrophique en Allemagne, Carl  Krone avait dirigé, avec maestria, de 1914 à 1943, un des plus beaux et importants cirques européens, véritable modèle du genre.

Belmonte Bates

Sources

• Circus Charles – direction Carl et Ida Krone – Charles-Edouard Kosouskoff – circus-parade.com
• Zeitung Krone.
• Journal illustré Charles et affiches.
• Programmes et affiches Krone  – 1914 à 1943.
• Livre : Krone – Klaus Dieter Kürschner.
• Von fliegenden Menschen und Tanzenden Pferden – Gisela Winkler.
• Cirque Krone – Helmut Bauer und Benita von Bemberg.
• Das Busch vom Zirkus – Joseph Halperson.
• Krone im Bild – 1900-1943 – Henk van den Berg.
• La merveilleuse histoire du Cirque – Henry Thétard
• Das Programm.
• Der Circusbau Krone – Olaf Bartels
• Circus Krone – Raffaele de Ritis – circopedia.
• Carl Krone – Erna Büsing .

À lire

• Krone – Klaus Dieter Kürschner – Ullstein – Berlin – 1998.
• Der Circusbau Krone – Olaf Bartels – Dölling und Galitz – Hamburg – 1999.
• Cirque Krone – Helmut Bauer und Benita von Bemberg – München – 2013.
• Krone im Bild – 1900-1943 – Henk van den Berg.